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Thu, 09 May 2024

ADEPt – West Africa (Francophone)

Masterclasses

Ces pays ont été marqués par la présence française et sont toujours imprégnés de la culture d’occupation et d’une forme de domination économique, stratégique et géopolitique importante.

En ce qui concerne la partie de la recherche que j’ai assumée, mon enquête a porté uniquement sur huit pays francophones membres de la CEDEAO. (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Niger, Sé- négal et Togo) qui regroupe également huit autres pays (Iles du Cap Vert, Gambie, Ghana, Guinée Bissau, Libéria, Mauritanie, Nigeria, Sierra Leone) mais dont les enquêtes ont été réalisées par d’autres chercheurs.

Un accord économique et culturel de la CEDEAO a posé les bases d’une politique culturelle des seize pays sur trois plans:

  1. Développement de la créativité par le progrès social et l’amélioration du niveau de
  2. Stimulation d’une conscience communautaire par un sentiment d’appartenance à une communauté culturelle liée aux réalités géopolitiques, historiques et
  3. Intégration régionale par un développement communautaire respectant les réalités socioculturelles des populations, ainsi que les identités

La relation avec l’Union Européenne est consolidée à trav- ers le groupe de ces seize pays d’Afrique, plus des pays des Caraïbes et du Pacifique dénommé Groupe ACP.

Ces pays font également partie de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UE- MOA), à l’exception de la Guinée. L’UEMOA est une organisation régulant l’intégration économique des États membres, à travers la compétitivité des ac- tivités, dans un marché ouvert et harmonisé.

C’est dans ce contexte économique et culturel, et avec l’héritage d’un passé sous influence française, que les réalisateurs et les producteurs doivent exercer leur métier. Cela oriente parfois les projets soumis par les auteurs de films documentaires, car l’essentiel des fonds alloués proviennent des guichets français, CNC (Centre National de la Cinématographie et de l’Image Animée – Paris), OIF (Organisation Internationale de la Francophonie), Fonds Images Afrique du Ministère des Affaires Etrangères – Paris (en collaboration avec le CNC) et aussi avec les fonds attribués par la Commu- nauté Européenne.

La langue d’échange entre ces pays africains est toujours la langue française, mais une particularité importante est que tous les groupes ont conservé leur propre langue. Cette diversité des expressions linguistiques en Afrique de l’Ouest est un apport très important à remarquer et à souligner. Les auteurs de films documentaires ont la possibilité de travailler dans des contextes très particuli- ers; en privilégiant des points de vue très originaux, très proches des populations, en s’appuyant sur les expres- sions culturelles très distinctes de chaque communauté.

Le cinéma documentaire évoluant en Afrique de l’Ouest autorise alors l’approfondissement très net des particularités régionales, locales, transversales et permet d’encadrer les sujets dans une notion historique du passé à redécouvrir. Cela peut se faire dans un esprit purement documentaire dans le sens de la conservation des identités culturelles et du patrimoine. Et dans une orientation des projets vers une conception du docu- mentaire de création avec des analyses sur la société, sur l’environnement, sur la politique. La recherche d’archives et leur intégration dans les films est égale- ment une préoccupation majeure des réalisateurs.

Développer et amplifier la production de films docu- mentaires de création en Afrique est la seule façon de réduire la domination des productions extérieures. Ces produits d’importation stimulent des modes de penser inadaptés, via la diffusion sur les télévisions africaines des programmes occidentaux et en provenance d’autres pays émergents (Brésil, Inde).

C’est à travers tout cela que le cinéaste confirmé ou en devenir, doit acquérir sa volonté de passeur d’images, et peut intégrer, progressivement, par son propre développement, en phase avec l’évolution de sa propre société, un esprit d’engagement. Cet engagement se fait actuellement dans un contexte favorisant de plus en plus de liberté d’opinion et d’expression.

Le point positif c’est l’attachement que les réalisateurs ont pour les nouveaux projets en cours de développe- ment ou à développer, que ces films soient en direction du nord, ou en direction de leur propre pays.

L’aspect particulier, c’est la restructuration de la ciné- matographie en Côte d’Ivoire et en Guinée présent- ant au stade actuel quelques faiblesses vu le contexte politique de ces deux pays.

Mais la volonté farouche des réalisateurs et des pro- ducteurs de ces pays, confirme la voie vers une perspec- tive très positive et très dynamique. Il faut donc sou- haiter une restauration économique et politique de ces deux pays, et par voie de conséquence, de leur devenir culturel, incluant la cinématographie.

J’ai constaté que le saut technologique par la révolu- tion numérique en Afrique est un avantage évident, aussi bien pour la question de la fabrication que de l’exposition des films.

Tout en considérant une faible densité des salles de ci- néma dans ces pays, la diffusion peut se faire grâce aux propositions suivantes: soit le cinéma itinérant dans les campagnes et dans les villes, soit la diffusion VOD par internet dans les capitales.

Le coût réduit de l’équipement et des industries techniques permet une légèreté d’action, de la pro- duction à l’exploitation, tout en améliorant la qualité des œuvres.

Il faut constater aussi la carence des films documentaires créés en Afrique à l’intérieur des grilles de programmes des chaînes de télévision africaines. L’économie libérale, via les chaînes de télévisions encombrées de publicités et de telenovelas, est plus un obstacle à la diffusion de documentaires – engagés ou non -, qu’une éventuelle censure politique ou administrative.

Ma démarche méthodologique a été d’acquérir l’essentiel des informations et des éléments sur la situa- tion du cinéma documentaire de ces huit pays.

Dans un premier temps, c’est à distance que j’ai recueilli les éléments informatifs, dans le but de préparer mes voyages d’enquête. Cette préparation a permis de cibler les institutions, et surtout les personnalités pouvant m’informer sur l’état du cinéma documentaire de ces huit pays. Les enquêtes que j’ai menées sur place (excepté le Niger et le Togo que j’ai traité uniquement à distance), ont été fructueuses, l’accueil par les responsables a été très favorable et les échanges ont été agréables et ont bénéficié mes recherches.

J’ai noté une très forte volonté de développer le docu- mentaire de la part des responsables des cinématogra- phies des huit pays, qui consolident le volet juridique au sein de leurs institutions, permettant des accords de coproduction en partenariat sud – sud et nord – sud.

J’ai rencontré la même volonté de la part des pro- ducteurs et des réalisateurs qui ont le souhait de dével- opper leur projet dans les conditions idéales de produc- tion, tant au niveau de l’écriture que du développement et de la production.

J’ai privilégié l’emploi d’interviews sonores que j’ai enregistrées, ce qui a permis une liberté de ton et d’expression qui est en correspondance avec la liberté d’opinion grandissante dans ces pays.

Ces interviews sonores ont été transcrites, ce qui a permis le recoupement avec les informations acquises précédemment, et ces éléments ont structuré la forme finale de mon dossier.

Ce qui est à noter au travers de ces interviews, globale- ment, c’est que cette volonté générale de produire du cinéma documentaire engagé est soumise aux con- traintes dues non seulement à la réduction des apports financiers des pays du nord, mais aussi à la faiblesse des subsides attribués au cinéma des huit pays.

— Kadidiatou Diallo-Oriach